Never Ending Tour 2022

astralweeks a écrit:

Le petit défaut c'est effectivement la répétition du schéma "je commence seul au piano, presque a cappella, et le groupe arrive". Il le fait sur 5-6 morceaux je crois. Mais ceci dit, c'est réussi la plupart du temps...

Et puis bon, il joue un album entier. C'est assez rare, non ? Inédit ?

Oui j'avais écouté Portland à l'été et cela m'avait surpris, il faisait la même chose avec plusieurs titres. C'était tout de même bancale dans mon souvenir mais à voir. Je redoute un peu Key West qui est quand même décevante je trouve en live (même dans les différentes versions). Pour ce qui est du reste je pense qu'on aura droit à de très belles versions, notamment d'Every Grain of Sand qui est exceptionnellement placée en toute fin de set. Une première non? J'espère que l'harmonia sera de sortie pour clôturer les concerts du Grand Rex.

Pour ce qui est de l'album entièrement joué, oui je pense que c'est une première, car même à l'époque de Saved il ne jouait pas l'intégralité sur scène.

Le show de Copenhague :

J'ai fini d'écouter (au casque) le premier enregistrement d'Oslo (disponible sur ER en téléchargement, superbe qualité audio). Je vous en dresse un bilan détaillé ci dessous. 

Pour être très synthétique je dirais que les chansons de l'album R&RW sont bien maitrisées par Bob, exception faite pour Key West. Pour les autres chansons de son répertoire c'est beaucoup plus aléatoire. Je dirais à l'inverse de astralweeks que la première partie du concert est mieux réussie que la seconde lors de cette soirée.

En gras les meilleurs morceaux.

1)Watching the River Flow. Excellente! une belle entrée en matière à la guitare qui régale avec un son agressif. Ca me rappel les intro type Leopard Skin Pill Box Hat. Bob assure ensuite au piano et le Band se permet de belles envolées maîtrisées. La voix est tout de suite en place.

2) Go Your Way I Go Mine. Toujours pas ma tasse de thé. Je n'aime pas la version originale et je ne comprends pas vraiment pourquoi à 81 ans il choisit cette chanson des sixties qui est loin de sa veine poétique de l'époque. Un Plegding my Time aurait tellement plus de gueule (ne parlons même pas d'un Temporary Like Achiles...). 

3) I Contain Multitudes. Mon highlight de la soirée. Le troisième titre pourrait être le dernier. C'est maîtrisé tout en gardant de la place pour de l'impro. Les syllabes s'étirent, la prose est parfaite. Du grand grand Bob Dylan. D'ailleurs j'ai l'impression qu'elle est légèrement revisité dans l'instru. Rien que pour ce titre il faut aller voir Bob en concert! Ou du moins l'écouter en bootleg. Un chef d'œuvre d'interprétation. Et je n'exagère rien, ce n'est pas cette version d'Oslo qui me fera dire le contraire. Très bon piano au passage.

4) False Prophet. Ré arrangé et c'est une réussite. J'ai totalement redécouvert les paroles (avec le texte sous les yeux) et c'est clairement un moment fort du concert.

5) When I Paint my Masterpiece. Décevante. Peut être à cause de l'absence des autres musiciens? Autant elle faisait partie de mes favorites en 2019 (souvenez vous de l'harmonica entre chaque couplet), autant là je ne lui trouve plus grand intérêt.

6) Black Rider. Un autre titre phare de la setlist. Chanté divinement bien avec beaucoup de conviction à chaque phrase. J'adore.

7) My Own Version of You. La meilleure du concert après Multitudes. Un must pour laquelle j'étais parfois mitigé lors d'écoute précédente. Ce soir là à Oslo il est trop fort, on se croirait être dans la peau de la créature que le narrateur embellit à chaque couplet. Il faut que vous écoutiez cette version (ne vous fiez pas au faux départ car après il enchaîne). l'instru est modifié avant le dernier couplet où le rythme est saccadé pour être relancé sur les dernières phrases ce qui donne un final en apothéose.

I'll Be Your Baby Tonight. Ca commence très bien. Puis ça retombe net. Il faudra encore quelques concerts, on sent que la nouvelle version est en rodage (apparemment elle était déjà nettement meilleure le soir suivant). Mais oui c'est assez génial cette intro quasi a capela avec le Band qui lance la grosse machine derrière. C'est ce qui pouvait manquer parfois sur des Don't Think Twice, Shelter from the Storm etc. des chansons posées qui aurait pu partir dans les tours. Il fait pareil sur Serve Somebody plus loin.

9) Crossing the Rubicon. Réussite. Très différente de la version studio du coup et c'est ce qui la rend encore plus alléchante.

10) To Be Alone With You. Comme pour toutes les autres "anciennes" chansons, Bob ne se contente pas de changer fondamentalement l'instrumentalisation, il revisite les couplets de fond en comble. C'est cool d'entendre de nouvelles paroles mais la sauce ne prend pas. Le tout est bien mollasson

11) Key West. LA déception du concert. J'espère vraiment qu'il en fera autre chose au Grand Rex car merde, c'est Key West bordel ! Là il revisite complètement les instru, ça pourrait marcher mais là où la version studio est presque de l'ordre du spirituel, je trouve qu'à Oslo il s'engouffre dans une version un peu trop "triste" à mon goût. Je me suis ennuyé ferme.

12) Gotta Serve Somebody. Ca fonctionne bien, l'ensemble groove plutôt bien. Il commence par chanter sans les instruments lors du premier couplet et le Band le rattrape à toute vitesse. Les paroles sont toutes changées par rapport à l'originale.

13) Made Up my Mind. Légèrement différente. Très bien chanter. il modifie le "I've been from the mountain to the see" par "prairies". Il remodèle déjà un classique, l'une des plus attendues par son public. C'est superbe et je pense qu'elle n'a pas fini de me tirer les larmes à Paris. Mais l'intensité retombe par moment. Peu encore mieux faire.

14) That Old Black Magic. Ca nous rappel les années Sinatra. C'est sympa mais c'est pas non plus dingue. On sent le Band même un peu pommé et chaque musicien y va un peu à tâtons. Rien à voir avec les années Ricceli et Sexton ça c'est sûr.

15) Moter of Muses. Autant la version studio me laisse indifférente (par moment je ne l'aime pas du tout), autant la version live est une réussite. J'ai entendu de meilleures versions live lors du leg précédent mais c'est pas mal. Cela peut faire partie des must du concert avec un peu plus d'effort.

16) Goodbye Jimmy Reed. L'exemple type de la chanson qui met le feu à la baraque mais c'est dommage, on est déjà à la fin du concert. La nouvelle version est tout simplement géniale. Il manque une autre chanson de cette trempe là dans la setlist actuelle.

17) Every Grain of Sand. Superbement bien chantée, on est frustré d'entendre un début de solo d'harmonica et tout s'arrête. Dommage de finir là dessus.

Note globale: 16/20. C'est une très belle entrée en matière avec, il faut signaler le plus important, une voix au rendez vous. C'est un miracle de l'entendre chanter ainsi à 81 balais et ça fait toute la différence. L'envie est là même si ça s'essouffle par moment. Quelques envolées lyriques gratte le fond de la gorge mais rien de méchant, c'est même rassurant d l'entendre chanter à côté de la bonne tonalité par moment, c'est Bob ! Par contre on sent encore un Band en rodage, qui n'ose pas y aller et c'est déjà le sentiment que j'avais eu lors de la tournée automne 2021. 1 an après ce n'est pas encore parfait mais ça peut le devenir. Heureusement Donnie maîtrise ses instruments et continue à "faire le son" d'Old Bob. Malgré une bonne qualité audio je n'arrive pas bien à discerner la guitare de Doug Lancio. Bob Britt est bon. Le batteur est meilleur que Chamberlain et peut parfois faire des miracles (Jimmy Reed). Je me suis tout de même moins amusé en seconde partie de concert qu'en première partie. Le principal reproche que je ferais c'est la similitude musicale entre certains morceaux (False Prophet, Baby Tonight, Rubicon, Serve Somebody). Il manque une veine rock, un bon Highway 61 qui remettrait les choses à plat. Cette tournée s'annonce splendide pour les morceaux de R&RW, je suis incertain pour les autres titres...à chaud je dirais que je préfère 2019. 

Je vous recommande le téléchargement de ce bootleg pour sa qualité audio (sur le forum ER, taper Joy)

Rendez vous à Paris pour constater l'évolution de tout ça.

j'écouterais bien , y'a pas un lien direct quelque part ?

tiens, j'ai trouvé ceci

https://twitter.com/benclaywolf/status/1576963000942358528

Chinaski a écrit:

j'écouterais bien , y'a pas un lien direct quelque part ?

essaye ce lien:

[ltr]https://www.mediafire.com/file/3f1phqm0 ... r.rar/file[/ltr]

gengis_khan a écrit:

11) Key West. LA déception du concert. J'espère vraiment qu'il en fera autre chose au Grand Rex car merde, c'est Key West bordel ! Là il revisite complètement les instru, ça pourrait marcher mais là où la version studio est presque de l'ordre du spirituel, je trouve qu'à Oslo il s'engouffre dans une version un peu trop "triste" à mon goût. Je me suis ennuyé ferme.

J'écoute le concert du 2 octobre.
Il n'y est pas encore tout à fait, mais il est en train de trouver le ton juste.
En espérant que ça tombe sur le soir du Rex...

https://twitter.com/rayfp/status/1577365337917505553

Mince, moi qui projetais de lui envoyer des signaux en morse avec une lampe torche, je vais me faire sortir du Grand Rex

Chinaski a écrit:

https://twitter.com/rayfp/status/1577365337917505553

Mince, moi qui projetais de lui envoyer des signaux en morse avec une lampe torche, je vais me faire sortir du Grand Rex

C'est l'ingé lumière qui a mal projeté ses lumières bleues, elles font mal aux yeux ! Le mec a la scène la moins difficile à éclairer de toute la planète rock et il arrive à se planter !!

Ou alors c'est Bob qui voit la lumière au bout du tunnel...

Pour info il a remit ça hier soir en s'arrêtant durant la chanson Mother of Muses, demandant d'éteindre la caméra qui le filmait. Il s'est littéralement "caché" derrière le piano durant toute la fin de la chanson et Jimmy Reed. Son côté paranoïaque est de retour ! Heureusement que la majorité des téléphones sont dans des poches, sans quoi il ferait une syncope !

https://www.youtube.com/watch?v=zCNK057mMa4
Un extrait avec un son excellent
Je trouve que les morceaux manquent un peu de relief dans les arrangements, le texte a vraiment pris presque toute la place. Par contre le piano est bien mieux exécuté que dans les tournées précédentes ..mêmes s'il reste toujours quelque moments fantomatiques qui ont fait la légende de bob derrière son clavier

vox populi a écrit:

https://www.youtube.com/watch?v=zCNK057mMa4
Un extrait avec un son excellent
Je trouve que les morceaux manquent un peu de relief dans les arrangements, le texte a vraiment pris presque toute la place. Par contre le piano est bien mieux exécuté que dans les tournées précédentes ..mêmes s'il reste toujours quelque moments fantomatiques qui ont fait la légende de bob derrière son clavier  

Oui le piano est clairement à la hauteur. C'est un autre style, qui va avec son grand âge aussi. Plus d'instrumentation au piano (plus trop à l'harmonica ce qui est dommage), qui offre la possibilité au groupe de remodeler les (mêmes) chansons. C'est ce qui se passe déjà avec les deux enregistrements que tu as partagé. Un Jimmy Reed qui manque, je trouve, d'intensité dans la voix mais qui est très intéressante d'un point de vue musicale (différente d'Oslo). Ca jam carrément vers la fin ! Quant à Every Grain of Sand je la trouve très belle ainsi mais il peut encore la faire monter en intensité. C'est LA chanson finale. 

Mon amie qui l'a vu hier soir à Berlin écrivait dans sa review qu'il était davantage assis. Etre entendu sans être vu !   Cela offre de belles parties de piano. Et ça me donne bien envie d'écouter Berlin mais je vais garder la surprise jusqu'à Paris.

Le Key West du 5 me paraît encore meilleur. J'ai l'impression qu'il monte en puissance sur celle-là.
Je pense qu'il y en aura au moins une version "parfaite" à Paris...

j'ai reçu ça:

Vous avez acheté via notre réseau de vente, un ou plusieurs billets pour le concert de BOB DYLAN qui se déroulera les 11-12 et 13/10/2022 au Grand Rex à Paris, ce dont nous vous remercions.
En raison de la mise en place « PHONE FREE SHOW », le concert commençant à 20h30 précise, il est conseillé de se présenter entre 19h00 et 19h30 maximum pour éviter les longues files d’attente et éventuellement de rater le début du concert.

RAPPEL SUR PLACE : IMPORTANT : Ce concert est un « PHONE FREE SHOW », cela signifie que les téléphones ne sont pas autorisés dans la salle pendant le concert.
Comment ça fonctionne? Une fois arrivé sur les lieux, Yondr (la société de pochettes téléphoniques engagée sur ce concert) aura son personnel dédié à votre disposition pour vous aider à mettre votre téléphone dans une pochette verrouillée et sécurisée, que vous garderez avec vous tout au long de la soirée.
Que dois-je faire si j'ai une urgence et que j'ai besoin d'accéder à mon téléphone ? Vous pouvez à tout moment déverrouiller la poche de votre téléphone en vous rendant dans un espace dédié et balisé, destiné à l'usage du téléphone. N'hésitez pas à demander à un membre du personnel de Yondr de vous aider. a écrit:

Si je croise le Zim dans un couloir, je ne pourrais même faire une petite photo ?

Chinaski a écrit:

j'ai reçu ça:



Si je croise le Zim dans un couloir, je ne pourrais même faire une petite photo ?

Il préfère qu'on lui demande un autographe

Avant les concerts du Grand Rex.

Voilà de la belle ouvrage

Pourquoi ne pas le faire signer par le Zim lors de son passage à Paris ?

jplambert a écrit:

Petite anecdote, la dernière fois que Bob est passé au Gand Rex j'ai assisté à deux concerts, le premier soir avec mon épouse et le second avec ma petite fille.
Sachant que Bob quitait la scène en laissant jouer le groupe, le second soir mon épouse a attendu devant la sortie et a pu prendre
une photo furtive de Bob, capuche sur la tête, et entouré de son service d'ordre avant de monter dans une voiture.

Je l'avais croisé vers 17h totalement par hasard sur ce même trottoir entre la sortie du grand rex réservé au staff, et son tour bus garé juste à côté (il revenait certainement des balances). Il était à 5 mètres de moi, capuche sur la tête, quelqu'un lui a tendu une pochette de vinyle à dédicacer il l'a royalement ignoré. J'aurais pu lui lancer un salut mais je n'ai rien trouvé à lui dire sur le moment, sachant de toute façon, qu'il ne répondrait rien.

Je pense que ce sera différent cette année. Il quittera certainement le Grand Rex dans une berline comme il le fait dorénavant sans qu'on ai vu un bout de sa capuche.

En 2019 je m'étais dépêché à la fin du concert en sortant aux dernières notes de Thumb's Tom Blues mais je n'avais vu que Tony et cie, pas Bob.

Ouai un bien bel objet! comment est la qualité sonore? J'avais beaucoup aimé Portland car il remaniait de nombreuses chansons mais malheureusement l'enregistrement n'était pas à la hauteur (écouté sur youtube).

Une préférence?

A mardi jp !

Je serai là Paris pour le concert du jeudi soir.

Comme toujours avec Crystal cat l’objet est de très belle qualité et la qualité sonore est bonne.
Je n’ai pas encore écouté les 3 concerts, donc pas de préférence pour le moment.

J’espère que l’on se verra devant le Grand Rex.

Le show d'hier soir fait l'unanimité chez les Bobcats, Krefeld a été le meilleur concert de cette tournée européenne ! Ce qui nous promet un Bob en grande forme (je l'espère du moins) à Paris.

Il a joué de l'harmonica sur Baby Tonight et la version a enfin trouvé son envol, ce qui ne m'étonne guère vu l'alchimie qui s'y opérait déjà à Oslo.

Dans l'ensemble le bonhomme fatigue et joue pas mal assis donc j'espère que ceux qui seront en orchestre pourront l'apercevoir. 

Paris est apparemment le rassemblement de nombreux Bobcats et cela promet d'être 3 soirs d'anthologie.

A demain !

Je viens pour ma part seulement mercredi, certains seraient motivés pour une pinte ou un jus d'orange avant le concert?

used_spoon a écrit:

Je viens pour ma part seulement mercredi, certains seraient motivés pour une pinte ou un jus d'orange avant le concert?

Bien sûr ! je t'envoie un MP

Excellent article de Olivier Nuc (Le figaro)

Bob Dylan, le génie imprévisible
Nuc, Olivier
RÉCIT - La légende de la musique américaine se produit à Paris pour la première fois depuis 2019. Il va y interpréter la majorité des chansons de son dernier album, Rough and Rowdy Ways , considéré comme un des tout meilleurs d’une carrière amorcée au début des années 1960.

Dimanche soir, sur scène à Krefeld (Allemagne) pour son dernier concert avant trois dates parisiennes au Grand Rex, Bob Dylan a chanté neuf titres de son dernier album en date, Rough and Rowdy Ways , sorti en juin 2020. Aucun musicien de sa génération, au répertoire aussi immense que le sien de surcroît, ne fait cela. La plupart des artistes et groupes issus des sixties se contentent de jouer les juke-boxes ambulants, déroulant les tubes à qui mieux mieux sans prendre le risque de jouer des nouveautés au public. En juillet dernier, les Rolling Stones, qui ont démarré leur carrière deux ans après Dylan, jouaient des morceaux puisés dans les décennies 1960, 1970 et 1980 uniquement, à l’exception de Ghost Town , sorti pendant le confinement.

Cela en dit long sur la personnalité de Bob Dylan, qui n’est jamais tout à fait là où on l’attend. En plus de souligner l’excellence de Rough and Rowdy Ways , qui s’inscrit déjà parmi les meilleurs disques de son auteur, cela dénote le niveau d’exigence artistique du songwriter. Premier album écrit par Dylan après avoir reçu le prix Nobel de littérature en 2016, Rough and Rowdy Ways montre à quel point l’octogénaire est encore capable de se réinventer, après avoir endossé un nombre considérable de personnalités et de styles depuis sa première apparition publique, à l’orée des années 1960. On continue d’ailleurs de lire à son sujet qu’il est un chanteur, voire un «barde» folk, aux textes engagés. Dès 1964, le jeune homme de 23 ans amorçait son premier tournant en interprétant des chansons plus personnelles, avant d’adopter la guitare électrique avec fracas l’année suivante.

» LIRE AUSSI - Bob Dylan a vendu à Sony tout son catalogue de musique enregistrée

Certains ne se sont jamais remis de la conversion au rock de ce jeune homme qu’on avait érigé un peu vite en fils spirituel de Woody Guthrie alors qu’il a été fortement imprégné de Little Richard et d’Elvis. Son apparence au milieu des années 1960, costume noir, Ray Ban et boots, constitue d’ailleurs le canon du look rock, plusieurs décennies plus tard. C’est sous cette apparence que Cate Blanchett l’a incarné dans le génial biopic I’m Not There , qui demeure l’approche la plus intelligente de l’artiste. Dans ce film, Todd Haynes avait eu l’idée brillante de faire interpréter Dylan par six acteurs différents, en fonction de ses «périodes». Le père de famille, le hobo, le protest-singer, la rock star, le prophète, le poète sont tous réunis. On ne saura jamais ce que Dylan lui-même a pensé de cette évocation impressionniste.

Ce grand taiseux se voit souvent reprocher par les néophytes qui vont l’écouter de ne pas du tout s’adresser au public pendant ses concerts. C’est simplement parce que Dylan est un artiste, et pas un entertainer ou un roi du divertissement. L’imagine-t-on vraiment raconter des blagues depuis la scène ou commenter la météo? De toute façon, Dylan ne parle plus. Ou si peu. Lorsque la ministre de la Culture Aurélie Filippetti lui a remis la Légion d’honneur à l’issue d’un long discours, il a prononcé ces mots: «Je suis flatté et honoré. C’est tout» , avant de tourner les talons. En coulisses, il aurait eu une longue discussion avec Hugues Aufray, afin de convaincre ce dernier de lui vendre sa maison en région parisienne, à deux pas de la dernière demeure de Johnny Hallyday. En vain.

S’il n’est plus un hobo depuis longtemps, Dylan possède suffisamment de résidences dans le monde pour ne jamais être là où on l’imagine. Sa maison de Los Angeles a longtemps été son point fixe, mais il passe aujourd’hui le plus clair de son temps à bord de son bus de tournée. Seul, il y passe ses journées à écrire, entre deux villes où il se produit, tandis que le groupe suit dans un autre véhicule. Amorcé en 1988, alors qu’il vient de sortir le pire album de sa carrière, Down in the Groove , cet itinéraire sans fin lui a permis de retrouver de sa superbe. Entouré d’un groupe resserré, dont le bassiste Tony Garnier constitue le pilier, Dylan sillonne inlassablement le monde afin de se livrer à l’activité qu’il préfère: chanter sur une scène. Le regretté Elliot Roberts, qui a été son manager quelque temps pendant les années 1980, nous racontait une anecdote savoureuse. «Une nuit, Bob m’a appelé en me disant: “Elliot, il faut absolument que je joue à Seattle.” Mais tu y as chanté il y a un mois, lui répondis-je . “ Peu importe, trouve-moi une date là-bas.”»

Ce nouveau régime a correspondu à un net regain d’intérêt pour sa discographie, passée comme contemporaine. Oh Mercy , album studio inspiré de 1989, a constitué un impressionnant come-back, l’année même où ses contemporains Neil Young et Lou Reed signaient leurs meilleurs disques depuis dix ans. Et, deux ans plus tard, le premier volume des Bootleg Series marquait le démarrage d’une discographie parallèle, une entreprise passionnante. Enregistrements inédits, concerts rares, la collection a permis aux fans de pénétrer la psyché de leur artiste préféré mieux que ne saurait le faire n’importe quelle biographie. Sorti l’an passé, le volume XVII révélait ainsi que la première moitié des années 1980 - période maudite s’il en est - comportait son lot de bonnes chansons, pour la plupart jamais révélées. Le prochain coffret, qui pourrait sortir l’an prochain, serait, selon la rumeur, centré autour de l’album Time Out of Mind , chef-d’œuvre de 1997, et mètre étalon à l’aune duquel sa production des vingt-cinq dernières années est mesurée. Mais ce que l’exhumation de ces bandes a révélé, c’est que Dylan n’est pas le meilleur juge de son travail. Ainsi, Blind Willie McTell , aujourd’hui considérée comme une de ses meilleures chansons, avait été écartée de l’album Infidels , de 1983. Même la période chrétienne, correspondant à la conversion de Dylan, honnie par les critiques, comportait son lot de pépites.

En soixante ans de carrière, Bob Dylan a tout essayé: reprises folk dépouillées, le temps de deux albums du début des années 1990, vite oubliés, covers du répertoire de Frank Sinatra (trois disques dont un triple, entre 2015 et 2017), country pure ( Nashville Skyline , 1969). Il s’est même livré au pire exercice qui soit: l’album de Noël. En l’occurrence, Christmas in the Heart , sur lequel sa voix râpeuse faisait peur aux enfants! Mais Dylan, en véritable prestidigitateur, s’est remis de tout. Cet homme qui a complètement bouleversé l’écriture de chansons, en y injectant l’influence des poètes symbolistes français, est aussi un des plus fins connaisseurs du répertoire de la musique populaire américaine, dont il aime exhumer les perles oubliées. Au début de ce siècle, un producteur eut la riche idée de lui confier un programme radiophonique, Theme Time Radio Hour, manière de podcast avant l’heure. Ses playlists thématiques et éclectiques, toujours singulières et audacieuses, ont fait le bonheur des auditeurs.

Tenue remarquable

Cette année, dix-huit ans après la parution du premier volume de ses Chroniques , Bob Dylan publie un nouvel ouvrage. Il ne s’agit pas de la suite - ce serait trop simple - mais d’un exercice nouveau: l’analyse de chansons. The Philosophy of Modern Song s’attarde sur une soixantaine de titres, signés Hank Williams, Nina Simone ou Elvis Costello, en autant d’essais. On s’impatiente de lire le plus grand auteur de chansons des cinquante dernières années commenter le travail de ses maîtres comme de ses contemporains. Qui mieux que lui, qui a élevé le songwriting au rang d’art majeur - n’en déplaise à Gainsbourg -, pour faire autorité sur le sujet.

Bien sûr, il en est toujours pour arguer que Dylan est surtout un parolier, et surtout pas un mélodiste ni un chanteur. Ceux-là sont aujourd’hui aussi ridicules que l’homme qui a traité Dylan de «Judas» en plein concert en 1966. On n’aimerait pas entendre la playlist actuelle de ce visionnaire. Dylan est un compositeur assez primitif mais extrêmement habile, et le meilleur interprète possible pour son répertoire. Un répertoire qu’il s’amuse à revisiter à sa guise, pervertissant les lignes de chant, dissimulant les refrains derrière de nouveaux arrangements. Les mêmes disent aussi que Dylan n’est pas bon sur scène. Les derniers passages parisiens du maître montrent au contraire une tenue remarquable. Entendre Dylan en concert n’est jamais banal. C’est parfois déstabilisant, voire inconfortable, mais cela comporte aussi son lot de moments sublimes. À ce titre, ce nouveau passage au Grand Rex est une bénédiction. La vénérable salle parisienne, où il s’est produit pour la première fois en 1990 - alors que Jack Lang le faisait chevalier des Arts et des Lettres -, est idéale pour l’art de Dylan. C’est là qu’il avait donné ses derniers concerts parisiens, en avril 2019. On ne peut que se réjouir de vivre à la même époque que Bob Dylan, que Barack Obama avait qualifié de plus grand musicien américain de l’histoire en lui remettant la médaille présidentielle de la liberté, plus haute distinction civile des États-Unis en 2012.

Compagnon de la lutte pour les droits civils, champion de la cause afro-américaine, défenseur du boxeur Rubin Carter, héros de la chanson Hurricane , Bob Dylan a été un acteur majeur des évolutions de la société américaine. La chanson fleuve Murder Most Foul , qui retrace l’histoire du pays depuis l’assassinat de Kennedy en novembre 1963, est une fresque de près de dix-sept minutes qu’il est le seul à pouvoir se permettre. Sa sortie, en mars 2020, au tout début du confinement, a apporté un immense réconfort aux auditeurs, et connu une grande répercussion sur les ondes radiophoniques. Que Dylan soit capable de signer un chef-d’œuvre aussi original après six décennies de production est une raison suffisante pour admirer ce génie certifié.

C'est un très bon article qui fait plaisir. Merci du partage. J'ai bien aimé l'anecdote sans doute raconté par Aufray au journaliste concernant cet achat de maison près de chez Johnny !

Un article de François Moreau dans les inrocks, beaucoup moins intéressant que celui du Figaro

https://www.lesinrocks.com/musique/bob-dylan-ou-le-mythe-de-sisyphe-503785-07-10-2022/

gengis_khan a écrit:

J'ai bien aimé l'anecdote sans doute raconté par Aufray au journaliste concernant cet achat de maison près de chez Johnny !

C'est ce que j'allais dire. Si la seule source est Aufray, alors la fiabilité n'est pas de 100%...
En revanche si c'est vrai, la mention de la maison d'Hallyday est tout à fait secondaire : Aufray habite dans la maison de Maillol, le sculpteur.

Olivier Nuc n'est-il pas en train d'abandonner Neil Young pour rejoindre Bob ? Il est dithyrambique dans cet article...

astralweeks a écrit:

gengis_khan a écrit:

J'ai bien aimé l'anecdote sans doute raconté par Aufray au journaliste concernant cet achat de maison près de chez Johnny !

C'est ce que j'allais dire. Si la seule source est Aufray, alors la fiabilité n'est pas de 100%...
En revanche si c'est vrai, la mention de la maison d'Hallyday est tout à fait secondaire : Aufray habite dans la maison de Maillol, le sculpteur.

Olivier Nuc n'est-il pas en train d'abandonner Neil Young pour rejoindre Bob ? Il est dithyrambique dans cet article...

Ah oui, je trouvais ça étrange venant de Dylan qu'il souhaite acheter une maison dans le même quartier que Johnny mais si Aufray habite la maison d'un sculpteur alors c'est autre chose.

Si je le croise demain au Grand Rex je lui demanderais   Mais oui je serais curieux de connaître la source..

En tout cas c'est certainement la dernière fois que Dylan et Aufray ont eu un quelconque échange...

Cet été j'avais déjà été très (agréablement) surpris de la tribune au vitriol qu'avait publié Nicolas Ungemuth dans le Fig Mag sur la tournée des Rolling Stones. Il leur reprochait entre autre de venir relever les compteurs avec une set-list hyper prévisible sur fond d'éthique douteuse après le décès de Charlie Watts...Bref, de perdre toute crédibilité artistique sur scène et d'être devenus des pièges à gogo.
L'article remarquable d'Olivier Nuc est la suite logique de celui de Ungemuth.